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Lu sur JuriTravail : "La prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié constitue un mode autonome de rupture du contrat. Contrairement à la démission et au licenciement, la prise d’acte de la rupture n’est pas régie par la Loi. Cela étant, la Cour de cassation a progressivement défini son régime juridique, et l’employeur doit nécessairement se conformer aux solutions dégagées par la jurisprudence.
1. Définition de la prise d’acte
Celle-ci peut être définie comme l’acte selon lequel le salarié met fin au contrat de travail « en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail » (Cass. soc. 30 mars 2010, n° 08-44236).
Il résulte des termes employés par la Cour de cassation que les faits invoqués par le salarié doivent à la fois être établis et constituer des manquements « suffisamment graves » pour caractériser une rupture imputable à l'employeur.
Le plus souvent, la prise d’acte est matérialisée par une lettre recommandée avec avis de réception, que le salarié adresse à l’employeur et qui mentionne les motifs sur lesquels elle s’appuie.
La prise d’acte peut également émaner du Conseil du salarié, qui agit alors au nom de ce dernier (Cass. soc. 4 avril 2007, n° 05-42.847).
2. Effets juridiques de la prise d’acte
a. Rupture du contrat de travail
La prise d'acte a pour effet de rompre immédiatement le contrat de travail.
En effet, la Cour de cassation considère que « la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail » (Cass. soc. 31 octobre 2006, n° 04-46280).
Par conséquent, en présence d’une prise d’acte, l’employeur a l’obligation de considérer que le contrat de travail est rompu, à compter de la notification de la prise d’acte.
Bien entendu, le fait de considérer le contrat de travail comme rompu ne signifie pas pour autant que l’employeur reconnait que les griefs mentionnés dans la prise d’acte sont justifiés.
Sur un plan pratique, il est conseillé d’écrire au salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat, pour contester les griefs mentionnés dans son courrier.
Par ailleurs, il peut arriver que la lettre par laquelle le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail soit ambigüe ou même contradictoire.
En présence d’une telle lettre, il est nécessaire d’écrire au salarié, pour lui demander de préciser si sa lettre doit être considérée comme une prise d’acte de la rupture du contrat de travail.
A défaut, en cas de litige, le Conseil de prud’hommes peut considérer que le salarié n’a jamais pris acte de la rupture de son contrat et juger que l’employeur a procédé à son licenciement sans cause réelle et sérieuse.
b. La question du préavis
Dans la mesure où la prise d’acte implique des manquements graves de la part de l’employeur, elle a pour conséquence que le salarié n’est pas tenu d’effectuer un quelconque préavis.
Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a cependant considéré que le fait d’accomplir un préavis n’exclut pas la notion de prise d’acte de la rupture (Cass. soc. 2 juin 2010, n° 09-40.215).
La Cour de cassation a en effet jugé dans cette décision que « si la prise d'acte entraîne la cessation immédiate du contrat de travail, de sorte que le salarié n'est pas tenu d'exécuter un préavis, la circonstance que l'intéressé a spontanément accompli ou offert d'accomplir celui-ci est sans incidence sur l'appréciation de la gravité des manquements invoqués à l'appui de la prise d'acte. »
En pratique, pour se prémunir de toute contestation, l’employeur aura intérêt à rappeler au salarié qu’il est tenu à un préavis et que sa non-exécution ne saurait lui être imputable.
3. Effets pratiques de la prise d’acte
a. Documents de fin de contrat
A la suite d’une prise d’acte, l'employeur a l’obligation de tenir à la disposition du salarié son certificat de travail, son reçu pour solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi.
Il importe de préciser que l’employeur doit mentionner sur l’attestation Pôle Emploi le motif exact de la rupture du contrat (c’est-à-dire « prise d’acte de la rupture du contrat de travail » ou « autre motif »), sauf à encourir une condamnation à dommages-intérêts (Cass. soc. 27 septembre 2006, n° 05-40414).
En d’autres termes, même si l’employeur considère que les griefs contenus dans la prise d’acte ne sont pas justifiés et que celle-ci doit s’analyser comme une démission, ce motif de rupture ne doit pas être mentionné sur l’attestation Pôle Emploi.
b. Questions accessoires
En présence d’une prise d’acte de la rupture, l’employeur et le salarié doivent être vigilants sur le sort des questions accessoires à la rupture du contrat de travail : portabilité du droit individuel à la formation (DIF), portabilité de la mutuelle et de la prévoyance, levée de la clause de non-concurrence, etc.
Sur ce dernier point, la jurisprudence considère que la notification de la prise d’acte constitue le point de départ du délai de la levée de la clause de non-concurrence (Cass. soc. 8 juin 2005, n° 03-43.321).
Concernant le DIF, la Cour de cassation a très récemment jugé que « le salarié, dont la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est justifiée et qui n'est pas tenu d'exécuter un préavis, a droit à être indemnisé de la perte de chance d'utiliser les droits qu'il a acquis au titre du droit individuel à la formation » (Cass. soc. 18 mai 2011, n° 09-69175).
Par conséquent, il est conseillé d’écrire au salarié pour lui indiquer que, sans préjudice de la requalification de sa prise d’acte, il peut utiliser son DIF pendant une période équivalente à son préavis.
Enfin, pour ce qui concerne la portabilité des garanties santé et prévoyance, telle que prévue par l’accord national interprofessionnel du 18 janvier 2008, il est rappelé que pour bénéficier du maintien des garanties, l'ancien salarié doit fournir à l'ancien employeur la justification de sa prise en charge par le régime d'assurance chômage (art. 14, modifié par avenant 3 du 18 mai 2009).
Par conséquent, l’employeur aura intérêt à rappeler au salarié les dispositions relatives à la portabilité des garanties santé et prévoyance, en veillant bien à reproduire les dispositions de l’article 14 ci-dessus.
En pratique, il est probable que le salarié ne pourra pas bénéficier de la portabilité des garanties santé et prévoyance, car Pôle Emploi refuse son indemnisation tant que la prise d’acte n’est pas requalifiée en licenciement par le Conseil de prud’hommes.
En conclusion, l’employeur doit être particulièrement vigilant en présence d’une prise d’acte de la rupture du contrat de travail, et ce d’autant plus qu’elle précède très souvent un litige.
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN AVOCATS