Le gouvernement français s’apprête à engager une nouvelle réforme qui risque de porter un coup fatal au système de retraite par répartition en jurant une fois de plus que c’est pour le sauver. Le bilan des réformes menées depuis 1993 est déjà catastrophique car toutes les dispositions prises (calcul sur les 25 meilleures années, indexation sur les prix et non plus sur les salaires des actifs, allongement de la durée de cotisation sous peine de décote...) ont déjà fait baisser le niveau des pensions d’environ 20 %. Elles ont aggravé les inégalités déjà fortes entre les pensions des hommes et des femmes. Le Conseil d’orientation des retraites(COR) prévoit que le taux de remplacement moyen - niveau de la retraite par rapport au salaire, passerait de 72% en 2007 à 59 % en 2050. Cette dégradation continuera donc de frapper les actuels retraités et touchera également les générations suivantes.
Malgré ce bilan désastreux, le gouvernement veut aller encore plus
loin en supprimant l’âge légal de départ à
la retraite à 60 ans en le portant à 62, voire 65 ou 67 ans, comme le
demande le Medef, et en remettant en
cause le calcul sur les six derniers mois d’activité des retraites du
secteur public. Jumelées avec un nouvel
allongement de la durée de cotisation pour obtenir une retraite à taux
plein, ces mesures condamneraient à la
pauvreté la plupart des futurs retraités, surtout les femmes et tous
ceux et celles qui ont connu et connaîtront
des périodes de chômage et de précarité importantes. Ce sont les
salarié-es les plus jeunes qui subiraient les
effets cumulés de ces orientations au moment de partir à la retraite.
Le gouvernement et le patronat persistent à vouloir durcir les
conditions de départ en retraite alors même que
les entreprises continuent de se débarrasser des salariés âgés avant
qu’ils aient acquis la totalité de leurs
droits. Exiger que les salariés travaillent et cotisent plus longtemps,
alors que l’âge moyen de cessation
d’activité est de 59 ans, ne vise qu’à baisser le niveau des pensions.
De plus, cette logique remet en cause la
solidarité intergénérationnelle. Il n’y a aucun sens à augmenter l’âge
de la retraite alors que le chômage de
masse sévit pour les jeunes. Au lieu de voir dans la retraite par
répartition une transmission perpétuelle et
solidaire de la prise en charge d’une génération par la suivante, le
gouvernement et le patronat, afin d’attiser
la division, la stigmatisent comme un fardeau pour la seule génération à
venir.
Le danger ne s’arrête pas là. Le COR dessine les contours d’une réforme
pour remplacer notre système par
un autre « par points » ou « par comptes notionnels ». Dans les deux
cas, il s’agirait de ne plus avoir à
assurer un taux de remplacement du salaire défini à l’avance et de faire
de la variation du niveau des
pensions le moyen d’équilibre financier des régimes. Cela aggraverait
encore la baisse du niveau des
pensions et contraindrait les salariés, particulièrement les salarié-es
pauvres et effectuant les travaux
pénibles, à travailler toujours plus longtemps.
La vraie raison des mesures qui s’annoncent n’est pas liée à la
démographie. La crise financière a provoqué
une récession et donc une flambée des déficits publics. Les Etats
continuent benoîtement à financer leurs
déficits en empruntant sur ces mêmes marchés financiers qui ont provoqué
la crise. Réduire ces déficits
pourrait se faire par une taxation du capital. Mais les spéculateurs
refusent évidemment cette solution,
demandent que les Etats donnent des gages et exigent une réduction des
dépenses publiques.
Une alternative à cette régression sociale existe pourtant. A moins de
décréter la paupérisation des retraités,
il est normal de couvrir les besoins sociaux liés à l’augmentation de
leur part dans la population par un
accroissement des prélèvements sur la richesse produite. Les déficits
des caisses de retraite sont
essentiellement dus au refus obstiné de le faire. Pourtant, le besoin
supplémentaire de financement nécessaire
aux retraites est réalisable puisqu’il a été chiffré en 2007 par le COR
entre 1 et 2 points de PIB jusqu’en
2050, à comparer avec la chute de la part de la masse salariale de 8
points au cours des dernières décennies et
avec l’explosion correspondante des dividendes, qui sont passés de 3,2 %
du PIB en 1982 à 8,5 % en 2007. Il
est donc juste d’augmenter la part des salaires et des pensions dans la
richesse produite en s’attaquant aux
profits. Le financement des retraites est possible à condition d’en
finir avec l’actuel partage éhonté de la
richesse au bénéfice des revenus financiers. C’est ce partage qui
constitue le tabou à faire sauter, et non l’âge
de départ. Il s’agit là d’un choix politique de justice et de
solidarité.
La question des retraites pose celle de la société dans laquelle
nous voulons vivre. Nous ne pouvons accepter
la paupérisation programmée des futurs retraité-es, l’idéologie absurde
du « travailler toujours plus » et la
destruction des solidarités sociales. Nous souhaitons contribuer à une
vaste mobilisation citoyenne (réunions
publiques, appels locaux…) pour stopper cet engrenage.
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appel retraites
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